Macho, macho man

Généralement, février-mars est une des périodes, avec septembre, où de nouvelles recrues se présentent à la salle. Les habitués savent de quoi je parle : dans le lot, il y a ceux qui visent un entraînement sur le long terme, en complément d’un autre sport ou dans le but de se maintenir en forme et d’autres qui viennent dans l’espoir secrètement gardé d’afficher un torse musclé sur les plages cet été. Parmi ceux-là, comme pour toutes les espèces vivantes, s’opère une forme de sélection naturelle : certains s’accrochent et parviendront à sculpter un soupçon de pectoraux, d’épaules et de bras au prix de nombreuses heures passées au développé couché. Pour eux, débardeurs serrés et baggys taille XXXL pour cacher le retard pris sur les jambes seront de rigueur pendant les beaux jours. Quant aux autres, la plupart du temps, ils abandonnent au bout de quelques séances…

Des petites histoires au sujet de ces derniers, il y en a des tas. En voici une, intéressante d’un point de vue anthropologique : l’autre soir, alors que j’étais au début de mon échauffement au développé couché, je venais de finir une série de huit répétitions à 40 kilos, un jeune nouvellement arrivé, 20 ans tout au plus, qui m’observait avec un copain, s’invite sans prévenir sur mon banc. Ah oui, j’oubliais de préciser que ce genre d’anecdote ne peut arriver qu’au développé couché. Au squat, très rarement.
Donc, pour en revenir à mon histoire, je venais à peine de me relever, que ce jeune garçon s’allonge sur le banc sans avoir la politesse de me demander si j’y voyais un quelconque inconvénient.
Ben, vas-y, fais-toi plaisir, pensais-je et il débute sa série. Un de mes partenaires qui s’entraînait sur le banc incliné d’à côté me sourit et me fait signe de regarder l’importun qui me guettait du coin de l’œil. Après une quinzaine de répétitions faites jusqu’à l’épuisement, il me cède la place, comme si de rien n’était. Je rajoute 5 kilos de chaque côté et je poursuis mon échauffement.

Après avoir fini mes huit répétitions, l’intrus revient pour en faire une douzaine avec davantage de hargne, en me jetant quelques regards furtifs. Quelle mouche le pique ? Je reste impassible et remplace les disques par ceux de 20 et j’enchaîne huit répétitions.

Le gêneur, dont le débardeur super-stretch laissait supposer quelques heures de muscu’ à son actif, revient à la charge et termine difficilement sa neuvième répétition avec rage. Oui, comme il cherchait apparemment à m’en mettre plein la vue, j’ai compté les répétitions et j’ai noté que ces dernières déclinaient au fur et à mesure que la charge augmentait. Je passe à 80 et poursuis mon échauffement avec huit nouvelles répétitions. J’attends mon nouveau copain… Une minute passe …, puis deux… Il se repose peut-être ? Personne. Ben où est-il ? Pas loin en fait, il venait de reprendre son travail des biceps à quelques mètres de là, en continuant à me guetter de temps à autre. Et là, il est des moments où certaines petites victoires procurent une satisfaction accompagnée d’un plaisir jouissif presque inavouable. Je mets, sans sourciller, 100 kilos, puis 110, enfin 115, qui n’étaient pas prévus au programme, que je réussis à doubler.

Le comportement des uns, des autres, y compris le mien, diffère d’un milieu à autre, que ce soit au travail, dans le cercle familial, amical ou encore en voiture. Il en va de même dans la sphère sportive. S’entraîner avec quelqu’un de plus fort est toujours un plus. Rivaliser avec lui, pourquoi pas. Mais le faire avec autant d’animosité n’est pas très fair-play.

Depuis, l’avorton n’est plus jamais revenu m’importuner. Il a au moins le mérite de m’avoir motivé malgré lui pour cette séance. Jamais les charges ne m’avaient semblées aussi légères. Il ne vient même plus à la salle me semble-t-il. Dommage.

One Comment

  1. jeune con ! 😉

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